CONSTANTINE

CONSTANTINE
CONSTANTINE

CONSTANTINE, anc. CIRTA

Troisième ville d’Algérie avec 441 000 habitants en 1987, première grande ville intérieure et métropole de l’Est algérien, Constantine a été à travers l’histoire la capitale la plus constante du Maghreb central (Al-Moghreb al-awsat). À la tête du royaume numide des Massyles, dès avant Massinissa (Cirta), principale cité romaine de Numidie, évêché rebaptisé par Constantin, elle est décrite par El-Bekri et El-Idrissi comme la seule ville de la région dont la puissance économique ait survécu aux vicissitudes des XIe et XIIe siècles. Selon ces auteurs, la conservation de son assise foncière très étendue fut à l’origine de la permanence de sa spécificité urbaine et de sa prospérité. Elle persista, après la domination hafçide, durant la présence turque, comme chef-lieu du beylik de l’Est (notamment sous Salah-Bey) transformé, après 1830, par Ahmed-Bey, Kouloughli (descendant de Turc et d’Algérienne), en capitale d’un État d’Algérie orientale indépendant jusqu’à sa chute, après deux sièges, en 1837.

Ville de 30 000 à 40 000 habitants jusqu’alors, elle garda, même à demi détruite par la guerre et ramenée à 20 000 habitants, une vie urbaine dont ont témoigné en 1840 Warnier et I. Urbain, auteurs d’une notice officielle qui permet d’évaluer à environ 3 500 les personnes se consacrant au sein de corporations aux métiers d’artisanat du cuir, des textiles, des métaux, au grand négoce ou au commerce urbain et aux activités culturelles et cultuelles (habous, mosquées, medersas).

Durant toute cette période, elle a dû cette permanence au site exceptionnel de son rocher, barre calcaire truffée de cavités karstiques, incisée par le Rhummel antécédent qui l’isole, à l’est et au nord, des djebels Ouahch et Sidi Mcid par un profond canyon, dominant de 300 mètres, à l’ouest, le bassin d’El-Hamma. À la fois oppidum et lieu d’ensilage commandant la seule vallée ouverte des Hautes Plaines à la mer à travers le Tell entre le Bou-Sellam (Sétif) et la Seybouse (Guelma), elle avait pourtant déjà projeté, hors les murs, sur le fragile pédoncule séparant, au sud-ouest, du haut Rhummel et des Hautes Plaines le versant sud du bassin d’El-Hamma, le faubourg d’artisanat et de dépendances beylicales du Coudiat Ati. Lieu multiple de contact entre montagne arrosée polyculturale du Tell au nord et Hautes Plaines céréalières et pastorales au sud, entre ces cultures sèches et son bassin abrité et irrigable grâce aux résurgences du Rhummel au nord-ouest, elle occupe une situation urbaine classique au Maghreb au carrefour de la route caravanière méridienne du Sahara (Biskra) à la Méditerranée et de la rocade Alger-Tunis par Sétif et Djemila.

L’extension du site aux deux rives du ravin, franchi depuis l’Antiquité par un pont (el-kantara ), a été imposée par les structures économiques de la colonisation: les voies ferrées de Philippeville (Skikda), d’Alger puis de Guelma ont, à partir de 1869, en rive droite et sur la route d’El-Khroub, implanté la gare, ses entrepôts et ses silos, puis le dépôt de Sidi Mabrouk et, au XXe siècle, les premiers quartiers industriels. L’addition, déjà difficile, des ponts Sidi Rached et Sidi Mcid n’a pas suffi à établir des relations fluides entre les nouvelles extensions urbaines (faubourgs Bellevue et Lamy/Émir Abd-el-Kader) et le centre déplacé sur «la Brêche» qui concentrait encore, avec la médina amputée de la Qaçba, densifiée et dégradée, administration, négoce, commerce et artisanat. Cette structuration a laissé en marge les quartiers d’habitat précaire produits par l’exode rural avant et pendant la guerre d’indépendance, implantés dans les interstices non constructibles et dangereux face au ravin ou à la pente érodée du bassin d’El-Hamma.

Le potentiel industriel, élaboré de l’indépendance à 1980, avait contribué à desserrer les activités urbaines notamment vers ses zones industrielles: vers le sud, le complexe textile (1967), et les complexes moteurs-tracteurs (1973) et machines-outils (1976) à Oued Hamimine; au sud-ouest, le complexe de matériel de travaux publics à Ain Smara (1980), et d’unités au nord-ouest dont la cimenterie d’El-Hamma. Il avait porté l’effectif de ce secteur de 5 000 en 1954 et 4 000 en 1966 à 30 000 en 1987. La réduction des productions d’environ 50 p. 100 (de 6 300 à 3 500 tracteurs de 1985 à 1990, de 12 000 à 7 500 moteurs, de 2 800 à moins de 2 000 dumpers) a entraîné le sous-emploi du personnel des entreprises publiques et un accroissement massif du chômage. L’emploi, auparavant important dans le bâtiment (encore 14,7 p. 100 du total en 1987), a régressé. L’accroissement du secteur tertiaire et son envahissement par l’informel contribuent plus à déstructurer l’économie de la ville qu’à compenser ces reculs. L’emploi total, porté dans la ville proprement dite de 28 400 à 97 000 entre 1966 et 1987, est stagnant depuis lors. Malgré le ralentissement de la croissance démographique (de 4,6 p. 100 avant 1966 à 2,3 p. 100 après 1977) et l’exurbanisation des programmes de grands ensembles puis de lotissements à El-Khroub, El-Hamma et Ain Smara, un desserrement inégal, qui maintient un habitat précaire étendu et l’entassement des couches dans les vieux quartiers populaires, aggrave les contrastes sociaux.

Les fonctions métropolitaines de Constantine, malgré l’émergence d’Annaba, se sont consolidées par la création et le développement de son université (plus de 25 000 étudiants), le maintien de sa tradition cultuelle (mosquée Émir Abd-el-Kader), le renforcement de sa prééminence financière et commerciale publique et privée sur l’Est accentuée par l’implantation de sièges d’entreprises nationales décentralisées.

Ni ce maintien, ni les attributions de logements et de lots à bâtir dans la ceinture sud-est - sud-ouest de la ville, ni la solution en cours du problème de l’eau par le barrage du Grouz n’évitent à la ville une crise sociale qui y fut sensible dès avant octobre 1988.

Constantine
(auj. Qassantîna) v. d'Algérie, dans les gorges du Rummel; 448 000 hab.; ch.-l. de la wilaya du m. nom.; 2 150 km²; 790 000 hab. Industr. text., alim., méca.
Université. Musée archéol.
Anc. Cirta, cap. de la Numidie, la v. fut détruite en 331 au cours d'une insurrection; devenue colonie romaine, elle fut reconstruite par Constantin. Les Français la prirent en 1837. Patrie du cheik Abdelhamid Ben Badis (1889 - 1940), le fondateur de l'Association des oulémas.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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